Droit à l’image et contrats de sponsoring : une articulation délicate entre droits des athlètes et spécificités de l’écosystème sportif

En France, le droit à l’image est un droit fondamental issu de l’article 9 du Code Civil, qui dispose que « Chacun a droit au respect de sa vie privée ». Contrairement à certains pays, notamment anglo-saxons, la notoriété d’un individu et son exposition médiatique n’ont aucune incidence sur sa capacité à autoriser ou refuser l’exploitation de son image par un tiers.

Les athlètes de haut niveau, comme toute autre personne, disposent du droit de disposer de leur image et de la commercialiser en tirant profit de leur notoriété, notamment en concluant des contrats de sponsoring avec les partenaires qu’ils choisissent. En pratique, cette liberté de principe se heurte régulièrement à des restrictions propres à l’écosystème du sport.

Image individuelle, associée et collective des athlètes

L’athlète de haut niveau étant rattaché à une fédération sportive, et généralement à un club, il se trouve bien souvent tenu par un certain nombre d’accords (accords collectifs, contrat de travail, règlement de la fédération, etc.) encadrant l’utilisation de son image et sur lesquels il a peu de marge de manœuvre. Il est alors nécessaire de distinguer :

- l’image individuelle de l’athlète, dont l’utilisation est exclusivement contrôlée par ce dernier ; - l’image individuelle de l’athlète associée à l’activité de la structure sportive dont il fait partie, qui permet au club ou à l’équipe d’utiliser l’image de ce dernier pour promouvoir sa structure ou les compétitions auxquelles elle participe, sans avoir besoin de recueillir son consentement ; - le cas particulier de l’image collective des athlètes appartenant à un même club ou une même équipe : lorsque les athlètes présents à l’image représentent plus de 50 % de l’effectif présent sur le terrain, le club ou l’équipe peut parfois imposer le contrôle exclusif de cette image collective et peut décider d’y associer ses propres partenaires.

L’articulation entre ces différents types d’image des sportifs entraîne régulièrement des situations litigieuses, puisque certains athlètes peuvent être réticents à associer leur image à certains partenaires de leur structure sportive ou de l’événement auquel ils participent. En 2022, Kylian Mbappé avait notamment refusé de participer à des opérations marketing avec l’Équipe de France de football et certains partenaires commerciaux de la Fédération Française, estimant que ces derniers n’étaient pas en phase avec les valeurs qu’il prônait.

L’encadrement strict de l’image des athlètes pendant les événements sportifs majeurs

En matière de contrats de sponsoring et d’utilisation de l’image des athlètes, les problématiques se compliquent encore davantage lors d’évènements sportifs majeurs. Les Jeux Olympiques et Paralympiques en sont probablement l’exemple le plus flagrant.

La règlementation des Jeux Olympiques et Paralympiques, souvent au cœur des débats, impose en effet des restrictions importantes aux athlètes en matière d’utilisation de leur image. Cette réglementation vise à protéger les sponsors officiels du Comité International Olympique (CIO) et du Comité International Paralympique (IPC), en limitant les communications commerciales des athlètes avec leurs sponsors personnels durant une période définie, appelée la « période protégée ».

Pendant cette période, un athlète est limité à un message de remerciement par sponsor, sans pouvoir faire référence à un produit ou un service particulier, et sans pouvoir utiliser des éléments protégés qui sont la propriété du CIO ou de l’IPC (anneaux olympiques, images du site olympique ou paralympique, médailles, etc.). L’objectif est clair : garantir l’exclusivité des partenaires du CIO et de l’IPC, qui financent une grande partie de l'événement, et éviter que des marques non-partenaires tirent profit de l’extraordinaire visibilité associée aux Jeux.

Outre l’exemple des Jeux Olympiques et Paralympiques, la plupart des événements sportifs majeurs mettent en place des règles contraignantes pour les athlètes en ce qui concerne l’utilisation de leur image et la promotion de leurs sponsors personnels, dans le but de préserver les droits des sponsors officiels de l’événement.

En conclusion

Le droit à l’image des athlètes est un terrain complexe, impliquant d’articuler les droits individuels de chaque sportif avec les intérêts légitimes des structures telles que les clubs, les fédérations ou les organisateurs d’événements, qui permettent d’assurer le financement du mouvement sportif.

L’articulation de ces droits et intérêts parfois divergents passe nécessairement par une négociation contractuelle avisée entre chaque acteur concerné, afin de garantir un équilibre entre les libertés des athlètes et les impératifs économiques liés au financement de l’écosystème du sport.

En parallèle, il est nécessaire de rappeler la tendance jurisprudentielle qui tend à qualifier le sportif sous contrat de sponsoring à un mannequin et au régime juridique associé. Une telle assimilation entraîne des conséquences significatives pour les athlètes en matière fiscale et sociale. Cette question, toute aussi délicate, fera l’objet d’une réflexion approfondie dans un prochain article.

Articles similaires