Management fees : un nouvel espoir d’une approche pragmatique

Il est fréquent qu’un dirigeant de société choisisse de facturer des prestations de direction au profit de la société via une structure holding. Ces prestations sont couramment appelées les « management fees ».

Ce schéma, classique, est toutefois régulièrement remis en cause par l’administration fiscale lorsque les prestations facturées à la société par la holding du dirigeant, relèvent ab initio de la compétence du dirigeant de la Société et n’ont pas à être effectuées par une société tierce dont il est associé et dirigeant quand bien même celui-ci ne serait pas rémunéré par la Société. Cette approche repose sur un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation de 2010.

La sanction est lourde de conséquences puisqu’elle consiste en une remise en cause totale ou partielle de la déductibilité des sommes facturées par la holding dans la société (sans compter les éventuelles pénalités pour manquement délibéré de 40% …).

Pour pallier ce risque de remise en cause, l’astuce développée par la pratique consistait à désigner la holding en qualité de mandataire social de la société bénéficiaire des prestations. Ce palliatif impliquait toutefois d’exclure un certain nombre de formes sociales, comme les SARL dont le gérant est obligatoirement une personne physique. En outre, cela ne répondait pas de manière satisfaisante à la situation, tant la jurisprudence en la matière semblait dénuée d’une approche économique et réaliste de la situation de l’activité d’une société.

L’espoir est permis avec cet arrêt du Conseil d’Etat du 4 octobre 2023 (CE, 9ème et 10ème ch., 4 octobre 2023, n° 466887, Sté Collectivision), qui a considéré que la rémunération d'un dirigeant par une société tierce (c’est-à-dire non mandataire sociale), en vertu d'une convention de prestations de services, ne révèle aucun acte anormal de gestion dès lors que cette rémunération indirecte du dirigeant relève d’un choix clair voulu par les organes sociaux de la société.

Cette solution nous parait satisfaisante, à plusieurs égards :

- Elle confirme que l’Administration n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion de l'entreprise ;

- Elle affirme que le choix de la société de rémunérer indirectement le dirigeant ne constitue pas, en lui-même, un appauvrissement de la société à des fins étrangères à son intérêt.

- Elle précise que s’il est arrivé qu’avant la conclusion de la convention, le dirigeant n’ait pas été rémunéré, cette absence de rémunération ne constitue pas une décision de gestion faisant obstacle à la rémunération de ce même dirigeant ultérieurement ou par l’intermédiaire d’une tierce personne.

Attention toutefois à ne pas crier victoire trop vite, le schéma retenu ne reste pas dénué de tout risque, comme le souligne d’ailleurs le rapporteur public, dans ses conclusions : « la décision de verser au dirigeant une rémunération indirecte plutôt que directe  peut même, lorsque le montage permet d’éviter le versement de cotisations sociales réduire la charge liée à la rémunération des fonctions de direction. La pratique est peut-être pendable voire susceptible de caractériser [...] une fraude [...] mais elle n’appauvrit pas l’entreprise ».

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